Conditions provisionner une créance

Si un client ne paie pas sa facture, à partir de quel moment est-il possible de la provisionner ?

Le principe et la comptabilisation d’une provision client ont déjà été traités dans notre premier article de ce dossier. Il s’agit de revenir ici sur les conditions à réunir avant de pouvoir passer une provision sur un client douteux.

Provisionner ou non un client ?

Si un client ne paye pas sa facture, l’entreprise a alors comptabilisé sans contrepartie :
 une vente, un produit : l’entreprise paiera donc davantage d’impôt sur les sociétés ou, son associé, davantage d’impôt sur le revenu,
 de la TVA collectée : l’entreprise doit reverser sans attendre cette TVA au Trésor Public.

Or, si des produits figurent en comptabilité, la réalité économique est à l’inverse une perte, puisque les biens sortis de stock ou la prestation fournie restent impayés.

Une provision permet de régulariser cette situation, et donc de présenter des comptes conformes à la réalité économique de l’entreprise.

Mais, de fait, une fausse provision, ou une provision constatée sans justification, permet de limiter son bénéfice imposable et sa TVA à reverser. Dans les deux cas, l’Etat subit un préjudice. Les provisions, et notamment les provisions pour clients douteux, sont donc surveillées et parfois contrôlées par l’administration fiscale. Il est donc indispensable de pouvoir justifier une telle écriture au moyen d’un dossier des provisions pour créance douteuse ou litigieuse.

Le montant global et la variation des provisions

Il ne faut pas oublier que l’administration fiscale dispose de deux informations précises concernant l’état des provisions d’une entreprise, et en particulier de ses provisions clients :
 le montant total de ses provisions clients à la date de clôture : dans le bilan déposé, à l’actif, dans la colonne des provisions,
 la variation de ces provisions durant l’année dans le tableau de passage des provisions qui figure dans la liasse fiscale et qui mentionne : l’augmentation des provisions durant l’exercice, le montant des reprises.

L’importance relative de ces provisions est donc facilement mesurables, et une provision importante entraînera certainement au minimum une demande d’information fiscale.

Pas de poursuite judiciaire imposée

L’administration fiscale n’impose pas, pour pouvoir constituer une provision client, d’avoir intenté une procédure judiciaire contre son client. Il n’est donc pas obligatoire de pouvoir prouver, par des courriers d’avocat par exemple, une quelconque procédure en cours pour justifier la comptabilisation d’une provision sur un client.

En effet, de telles démarches peuvent être préjudiciables pour l’entreprise qui constate déjà un impayé. C’est une réalité : un client important qui conteste une facture est quasiment intouchable, car comment poursuivre judiciairement un partenaire qui nous assure une grande part de notre chiffre d’affaires annuel pour quelques centaines ou milliers d’euros. Un dilemme économique apparaît alors. Le fisc n’y ajoute pas un dilemme comptable : même en l’absence de poursuites de son client, une provision peut être justifiée.

Autre cas de figure : le client totalement insolvable, c’est une certitude pour tous ses partenaires. Pourquoi dépenser alors de l’énergie ou de l’argent en poursuivant judiciairement ce client ?

Un dossier de provision à constituer

L’absence de procédure judiciaire n’indique pas pour autant qu’une provision peut être constituée sans aucune justification.

Le dossier de clôture, pour chaque provision sur client douteux constituée, devra pouvoir justifier :
 la perte ou la charge nettement précisée,
 les évènements qui rendent probable cette perte (courriers échangés ou absence de réponse aux relances envoyées, ouverture d’une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation...),
 l’évaluation de cette perte (perte totale ou simplement partielle si un accord semble possible en accordant un rabais).

Pour évaluer cette perte, il est indispensable de pouvoir s’appuyer sur les intentions de son client, intentions clairement écrites ou que l’on peut déduire de son comportement et de ses réactions aux relances envoyées. Il est donc indispensable de pouvoir s’appuyer sur une procédure de relance rigoureuse avant de pouvoir constater des provisions clients :
 relance courrier simple, aussi rapidement que possible, éventuellement renouvelée,
 mise en demeure de payer par recommandé,
 procédure judiciaire simple : injonction de payer ou référé-provision.

Quelles sont les conditions pour pouvoir provisionner une facture client non payée ? Quelle procédure de relance permet-elle de justifier la comptabilisation d’une provision déductible du résultat fiscal de l’entreprise ?

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